quand on se voit
l’image que je vois devant moi
diffère de celle que tu vois devant toi
forcément, puisque je suis moi
et que tu es toi
je te vois devant moi
mais l’image de toi que j’ai en tête
n’est pas la même que celle que tu as
toi de toi
et celle que tu t’es faite de moi
n’est pas la même que je me suis faite
moi de moi
sûrement pas
ces images qu’on a en tête l’un de l’autre
prennent toute la place entre toi et moi
et malheureusement des fois
il n’y a plus d’espace autrement
la plupart du temps, bien sûr, on s’ajuste
je mesure l’image que je garde de toi
à celle que j’observe quand tu es là
je modifie doucement ton image
et tu modifies la mienne
chacun sans trop s’en rendre compte
d’autres fois, le titan qui t’accompagne
quand tu penses à moi
il se tient là, entre toi et moi
et ce n’est pas moi — pas du tout même !
en tous cas, pas celui que je pensais être moi
inversement, celle que tu penses être toi
n’est pas la titane que je vois,
ou que je pense voir quand je te vois
— c’est le choc des titans